Axel Khan, célèbre généticien, conférencier invité au premier congrès international du RIFRESS en 2019 à Rabat, Maroc, disait « Imaginer un monde meilleur, c’est affirmer que rien n’est plus important que de manifester sa considération pour l’autre ». Mais, qui est l’autre ? Son voisin, l’étranger, la communauté, le pays, la planète ? Selon le concept de responsabilité sociale en santé, tous ces « autres » méritent considération. Quant à la « considération », elle implique l’engagement à agir sur les déterminants de santé et de bien-être. Ce n‘est donc pas chose simple que de s’intéresser à l’autre quand l’attention se porte sur une diversité de sujets et sur la multi-causalité !
Nous n’avons guère été préparés à composer avec cette complexité, ni dans notre formation, ni dans notre exercice professionnel. En effet, comme praticien, enseignant, chercheur, administratif, le mandat qui nous est confié comprend des prestations bien établies et réglementées par la tradition, l’expérience ou la législation, dont la verticalité ne permet pas toujours de regarder la réalité des besoins de santé et bien-être de la société dans toute leur complexité. C’est une question de regard !
Supposons que nous utilisions un entonnoir comme instrument optique pour observer le monde autour de nous. En jetant un œil par la grande ouverture (option A), le regard se porte sur un objet précis dans le paysage. Par contre, par le petit bout de l’entonnoir (option B), le regard s’ouvre sur un large paysage dans lequel l’objet précis est alors observé dans son environnement.
Souvent notre regard est porté par l’option A alors que la responsabilité sociale en santé invite à observer le monde par les deux bouts de l’entonnoir afin de mieux comprendre le contexte dans lequel nos actions sont menées, d’identifier les facteurs susceptibles d’optimiser celles-ci, de profiter de l’opportunité de sortir de la verticalité de notre métier par une action transversale, impliquant coordination avec d’autres métiers, pour être plus proche de la réalité des besoins de la population.
Ah, si les principaux acteurs de santé pouvaient changer leur regard, en allant de temps en temps jeter un œil du côté du petit bout de l’entonnoir, l’inspiration leur viendrait peut-être pour ajuster leurs missions et projeter des actions novatrices pour un système de santé qui soit juste, efficient et pérenne.
Avec l’entonnoir de la responsabilité sociale à portée de main, notre regard peut changer pour une vraie « considération pour l’autre » !
Charles Boelen, Président du RIFRESS : boelen.charles@wanadoo.fr